Les tombes mystérieuses de la vallée des rois
Par Violaine Vanoyeke
Science & Vie N°982, juillet 1999
Siptah, Taousert, Sethnakht, Bay, Amenmès, Mérenptah : autant de pharaons ou de dignitaires peu connus dont les tombes recèlent pourtant d'intrigantes merveilles.
Les tombes de Séthi II et de Siptah (KV 47), qui lui succéda, présentent quelques indices laissant supposer que les deux hommes traversèrent des périodes mouvementées.
Près de celle de Séthi II, son père, la tombe de Siptah (détail ci-dessus).
Sa momie nous apprend qu'il était de santé délicate.
Les témoignages recueillis dans le village des ouvriers des tombes, à Deir el Medineh, semblent renforcer cette thèse. Alors que les salaires étaient régulièrement versés aux ouvriers, ceux-ci ne paraissent plus être octroyés qu'irrégulièrement pendant ces années de troubles.
L'observation de la tombe de Taousert, la Grande Epouse royale de Séthi II, dont l'ouverture au public a été fixée cette année (tout comme celle de la tombe de Séthi II) soulève également bien des questions. La reine y apparaît sur les murs avec Sethnackt, son successeur.
Siptah choisit le nom de Mérenptah, reprenant celui de son ancêtre afin de renforcer son pouvoir.
Ci-dessus, un détail du plafond de la tombe du pharaon.
Dans la vallée des Rois se trouvent également les tombes de deux autres acteurs importants de cette période le grand chancelier Bay et Amenmès (KV 10), qui prétendait être le petit-fils de Ramsès II. Après le long règne de ce dernier, Mérenptah (qui fut enterré dans la KV 8), treizième fils de Ramsès II succéda à son père. Déjà âgé lorsqu'il prit le pouvoir, il sut préserver l'Egypte des envahisseurs.
UN CHANCELIER PEU ORDINAIRE
Séthi II (enterré dans la KV 15) lui succéda. Il régna à son tour pendant une dizaine d'années. Alors que Mérenptah avait fait figurer dans son nom celui du dieu Ptah, Séthi choisit celui de Seth, un dieu redouté. Séthi II fit décorer le temple de Ramsès II à Hermopolis. Il intervint à Karnak notamment dans le temple de Mout. Il maintint les mines du Sinaï en activité.
A sa mort, Taousert dut assurer la régence de Siptah, qui n'était pas son fils. Celui-ci se fit appeler Mérenptah-Siptah, reprenant le nom du fils de Ramsès. L'analyse de sa momie a permis de déceler une anomalie à sa jambe gauche. Sans doute régna-t-il peu de temps. Amenmès en profita peut-être pour tenter de s'imposer. La tombe d'Amenmès resta inachevée. Elle fut abîmée sans doute volontairement. Taousert devint pharaon et régna pendant huit ans. Le chancelier Bay intervint à plusieurs reprises sous son règne. Il avait de nombreux titres : scribe royal, échanson, responsable du Trésor, conseiller. Prit-il la défense de Taousert ou tenta-t-il de la faire disparaître? Lui-même prétendit que la régente n'aurait jamais régné sans son intervention. Il fut enterré dans la vallée des Rois (KV 13), ce qui était un honneur extraordinaire pour un conseiller. D'aucuns en conclurent que les liens entre Taousert et Bay étaient plus forts que ceux d'un fidèle serviteur envers son pharaon, d'autant que son ascension avait été rapide. Quoi qu'il en fût, Taousert régna ensuite au côté de Sethnakht., premier pharaon de la XXe dynastie. Comme tous les pharaons, elle portait de nombreux noms : " Aimée de Maât ", la déesse de l'équilibre, " Créatrice de l'Egypte ", " Celle qui tient sous le joug les pays étrangers ", " Aimée d'Amon ", le dieu de Thèbes, " Aimée de Mout ", " Belle souveraine ".
Les murs de la tombe de Séthi II, ouverte depuis 1999, ne nous livrent pas les clefs de la vie privée du pharaon.
En effet dans les tombes royales, le souverain est rarement représenté dans son intimité.
Sa tombe (KV 14) a-t-elle été terminée et "empruntée" par Sethnakht ? Celui-ci avait fait creuser dans la vallée des Rois une première tombe (KV 11) qui empiéta sur celle d'Amenmès. Aussi l'abandonna-t-il. La tombe KV 14 présente de magnifiques représentations de divinités dans une symphonie de bleus et de dorés intacts. Sur les murs, Taousert et Sethnakht ont été représentés dans une apparente complicité.
Bien que chacun de ces pharaons ait sans doute prévu son " temple de millions d'années " à la limite du désert, il ne subsiste, hélas, que peu de traces de ces monuments et bien peu d'éléments sur leur vie. Quant à leurs tombes resplendissantes et émouvantes, les divinités y sont représentées en grand nombre, mais elles conservent secrète la vie privée et politique des pharaons comme si elles gardaient volontairement les clefs du mystère.
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